Histoire Berbère

Textes collectifs à partir d'un conte berbère raconté par Mouha

La magicienne
Par Sébastien

- "Cléopâtre, mange tes pâtes."
La vieille magicienne soupira. Elle avait envie de lancer un arum à ce crétin de chancelier. Elle était venue depuis Tilili pour donner un conseil au prince d’Itran. Elle avait traversé le désert de feu ou elle avait failli recevoir une flèche et la montagne Akuch. Son dromadaire était mort en chemin. C’était une magicienne réputée, elle avait appris son art auprès d’Aman, le vieux sorcier du centre de la Terre et avait passé dix ans dans la bibliothèque Ayur à lire les quarante-cinq volumes du Afuluz, le livre sacré des prêtresses de Akuch. Cela lui avait donné du fil à retordre. Elle était enfermée dans une pièce et elle récupérait de la nourriture grâce à un seau qu’elle faisait monter avec une manivelle. Au fil de ses lectures, elle s’était rendu compte que le système était pourri. Le message de Macha, la grande prophétesse avait été perverti. Mais elle manquait d’outils pour trouver un remède à tout cela et s’enfermer dans une caverne pour méditer là-dessus ne lui serait d’aucun secours. Il faisait chaud dans la pièce, un feu brûlait dans un coin. Romla, le premier conseiller rentra.
- "Le prince Azul t’attend, Cléopâtre."



Tilili est née
Par Cécile

Romla regarde Tilili, si petite dans sa coquille. Ses yeux azul sont grand ouverts. Tilili a les yeux d’Aman. Romla aime Aman depuis l’enfance. Il est le fils du boulanger. Ahrom est le premier mot qu’ils ont échangé. Aman a coupé sa galette en deux et en a donné la plus belle moitié à Romla. Ayour, a t’elle répondu. Ils avaient alors 6 ans. Les jours qui ont suivi, Romla a demandé à sa grand-mère de confectionner les pâtisseries de la Vallée des Roses. Une rareté. Le vendredi, elle les a placées sur un large plateau rond et les a présentées à Aman. Afoulous a t’elle indiqué du doigt. Des pâtisseries jolies comme des bonbons, rondes comme les galets du désert, surmontées d’une fleur de sable en sucre brun. Aman a croqué dans une pâtisserie. Itran, a t’il dit en baissant les yeux. Romla a sourit. Lorsque Acouch est passée, elle a tourné sur elle-même pour dissimuler le plateau. "C’est seulement pour toi, Aman", a t’elle murmuré les yeux brillants.


Tilili et Ayur

Tilili et Ayur étaient sur les chemins. Il faisait chaud, il n’avait pas plu depuis des lustres. Ils n’avaient plus rien à manger. Il fallait qu’ils apprennent à chasser. Ayur pensait à sa mère disparue. Ils franchissaient un col très difficile. Soudain, Tilili tendit le bras : là-bas, un feu de cheminée. Il y avait donc quelqu’un dans ces montagnes. Ils ne seraient pas mangés par la Tarir cette nuit. 
Doucement, dit Ayur à sa sœur, ne te précipite pas, méfions-nous de ces gens.
J’ai faim, protesta Tilili.
Ils arrivèrent devant une grotte. La fumée sentait les légumes aux épices et les pommes rissolées dans le beurre et l’orange. Tilili rentra dans la pièce comme si quelqu’un l’attirait comme un aimant. Ayur la suivit.
Ils virent un grand chaudron, des bougies allumées, des plateaux de pâtisseries au miel et aux dattes. Tilili s’approcha mais Ayur la retint en lui tirant sa longue natte brune. 
« Entrez les enfants » dit Tarir d’une voix étranglée, une voix de tempête de sable. Ayour recula mais Tilili avança. « Mangez petits enfants ravissants » susurra Tarir en se léchant les babines. « Mangez et ne craignez rien, vous êtes ici chez vous. »
Ayur n’était absolument pas rassuré. Il détaillait la grotte dans laquelle semblait vivre cette vieille femme et ce qu’il percevait n’était guère engageant. Une bobine de laine ici surmontée d’une faux. Un écheveau là mais accompagné d’un horrible couteau à la lame étincelante. Il ressentit une irrésistible envie de fuir mais il ne le pouvait car à la différence de lui, sa sœur entamait déjà l’assiette de légumes fumant que Tarir lui présentait.
Il tenta tout de même de l’alerter en lui montrant d’un signe de tête les objets accrochés aux parois.
D’un clin d’œil, ils décidèrent de tout arrêter et de recommencer ailleurs leur projet fondateur. Ainsi commença une nouvelle histoire plein de surprises et d’imprévus.



La légende de la prêtresse des trois collines

Katnyatlourt Tlili et Ayour, l’une à tremper la laine de mouton et l’autre à secouer son tamis. Ils étaient là punis mais avaient surtout peur de Tarir, la femme fantôme mangeuse d’enfants. 
Ils se dirigeaient maintenant vers la montagne. Ils traversèrent le petit ruisseau puis le grand torrent.
Ayour ramassa un petit caillou doré dans le petit ruisseau et Tilili une pierre transparente dans le grand torrent. Après la forêt de tamaris et derrière le troisième virage après la montagne, les enfants aperçurent une lumière. C’était le début de la nuit.
Tilili prit la pierre transparente qui se mit à briller aussi fort que la lune qui était pleine ce jour-là. Elle monta sa main vers son visage et la regarda comme si elle savait que la pierre avait un message à lui transmettre. Ayour serrait fort dans sa main le petit caillou doré. Il avait peur. Il ne disait rien, il regardait Tilili et vit tout à coup sur son visage une grande lueur en forme de lune.
« Tu es devenue une Agoum, une prêtresse des trois collines » dit Ayour à sa sœur.
« C’est ce qui était arrivé à notre cousine Aïcha. Il faut que tu suives la formation de la mère Chaka. Viens je te mènerai à elle. Nous n’avons plus de père, il a tendu un piège pour nous faire disparaître. »
« Oui, je me sens étrange », répondit Tilili, «  comme si je ne voyais plus avec mes propres yeux mais avec les yeux de quelqu’un d’autre ».
Ils décidèrent de passer la montagne d’Erg banni pour consulter mère Chaka.
Alors qu’ils auraient dû marcher 5 jours et 3 nuits pour y parvenir, ils se trouvèrent tout à coup devant elle. Elle avait 5 tresses longues qui tombaient le long de son dos jusqu’au creux de ses genoux.
« Je vous attendais. Ayour sors boire le lait de l’ânesse. Je dois m’entretenir avec Tilili ». Ayour sortit.
« Tilili, tu es une Agoum, prêtresse des 3 collines. Tes yeux n’appartiennent plus à tes parents. Il te faut broder ta robe et partir. Ayour veillera sur toi ».
« Partir ? Mais où Mère Chaka ? »
« Le chemin se dessinera à mesure de tes pas. Ne te pose aucune question, avance, avance seulement. Va maintenant ».
Tilili sentit comme un étourdissement. Elle franchit la porte. Un oiseau rose au bec d’or se posa sur son épaule. Ayour se mit à côté d’elle et ils marchèrent. 
Aujourd’hui encore ils marchent. Les personnes chanceuses les aperçoivent dans leurs rêves. Alors le plus fou de leur souhait se réalise avant même qu’il l’ai formulé.




Variation autour de l’histoire de Tarir

Il était une fois, un jeune couple magnifique. A leur mariage, ils versèrent quelques larmes d’émotion et, très vite, eurent des jumeaux ravissants. Le fille fut prénommée Tilili, le garçon, Ayour. Tilili était fine comme sa mère Ipomée, Ayour avait le regard doux de son père Massine. Un malheur arriva à la troisième année de la naissance des enfants : Ipomée mourut d’une convulsion inexpliquée après avoir mangé de la crème de figues pourtant confectionnée de ses blanches mains. Massine pleura au point d’inonder tous les lacs du désert du Erg Bani. Enfin, il se décida à reprendre femme. Il choisit Tafoulous, arrière petite cousine de sa grand-mère Aïcha. Tafoulous n’avait rien de commun avec la douce Ipomée. Rude et égoïste, elle détestait la douceur de Tilili et le grand cœur d’Ayour. Massine ne voyait pas les mauvais traitements quotidiens qu’elle leur infligeait. Tantôt une tonne de sable à charrier pour renforcer le campement, tantôt de lourdes charges de bois à transporter pour attiser le foyer. Les enfants étaient encore si frêles que leurs petits corps se transformaient en bouts de douleurs. Ils ne disaient rien, trop bienveillants à l’égard de leur papa qui travaillait tant pour les nourrir et les vêtir. Lui, ils l’adoraient. Pour eux, il était le père parfait. La rugueuse Tafoulou faisait régner dans la demeure une vie difficile. Si difficile que les enfants décidèrent de partir. Il le fallait même si cela allait briser le cœur de leur père. Mais il avait choisi de se remarier. Dans la tête des enfants, cela voulait dire qu’il préférait faire sa vie avec Tafoulou qu’avec eux. Après quatre jours de marche, épuisés, les chaussures trouées par les cailloux, Tilili et Ayour avaient mangé toute leur nourriture. Après une énième colline, ils tombèrent sur une maison. Sans savoir qu’elle appartenait à la terrible Tarir, ils entrèrent pour demander de l’aide. Ipomée, de son nuage, retint sa respiration. Il fallait qu’elle fasse quelque chose. Elle contredit alors toutes les règles et vint habiter le corps de Tarir. Elle s’occupa bien des enfants, leur donna à manger le meilleur tajine et du pain fraîchement cuit et leur demanda : « Que faites-vous ici ? » Les enfants lui racontèrent la fuite, les mauvais traitements et les désenchantements en pleurant à chaudes larmes leur mère disparue. Ipomée, émue aux larmes, ne put se résoudre à retourner au ciel. Elle prit ses enfants par la main et retourna au village. Elle chassa Tafoulou de la maison sans ménagement en expliquant tout à leur père. Et ils vécurent heureux tous les quatre, Tilili, Ayour, Tarir-Ipomée et Massine qui trouvait vraiment que Tarir lui rappelait beaucoup sa femme adorée, Ipomée.


Tilili et Ayour 

Il était une fois, dans le royaume du Prince Azor, vivait une famille berbère. Macine, le père, était chamelier mais le plus fin chamelier de tous les temps. Il murmurait à l’oreille de ses dromadaires et obtenait d’eux des services que nul autre ne savait motiver. Sa première femme, Ipomé, était morte en couche. Ses deux enfants Tilili et Ayour n’avaient pas eu ce petit frère tant désiré. Macine s’était remarié à Tafouloust mais aucun des deux galopins ne parvenait à la considérer comme leur deuxième maman. Trop rude, trop revêche, elle ne manquait jamais de les rudoyer pour une assiette de couscous mal lavée ou un tajine trop cuit. 
Tafouloust décida de se déguiser en chameau bleu et dans sa bosse, elle cacha quantité de sucreries et fruits. Les enfants, étonnés au départ, rirent de bon cœur et mangèrent les friandises que Tafouloust leur avait apporté. A partir de ce jour, les enfants l’appelèrent maman. 
Macine qui comprenait les chameaux mais surtout pas ses enfants trouva très bizarre ce revirement de situation. Jamais ils n’auraient appelé Tafouloust maman, ils ne l’avaient jamais aimée, ce qui lui avait causé bien du chagrin. Il voulut en avoir le cœur net et décida d’aller voir le plus placide et le plus observateur des chameaux de son cheptel, Ouroudou, un grand chameau blanc âgé de plusieurs années. Qu’as-tu vu ? lui demanda Macine. « Cherche le chameau bleu » lui répondit Ouroudou, ce qui lui sembla être une réponse bien énigmatique. Pendant ce temps, Tafouloust déguisée en chameau bleu et accompagnée des enfants se rendait chez Tarir, l’ogresse. Elle avait décidé de lui vendre les enfants. Ainsi, elle serait débarrassée de ces petits morveux qui ne lui causaient que des tracas. 
Macine ne voyant toujours pas les enfants ni Tafouloust à la maison, décida de partir à leur rencontre. Mais par où ? Regardant à droite et à gauche, il aperçut sur le sol un fil de laine. C’était la laine que filait Tilili ! Il l’attrapa et le suivit. Tilili lui montrait le chemin. Il le suivit à travers les bois et les champs et se retrouva devant une maison toute délabrée. Il reconnut la voix de sa femme et comprit ce qu’elle était en train de faire. Il la chassa et vécut heureux avec Tilili et Ayour. 


Il était une fois...

Il était une fois un papa et une maman, Massine et Ipomée qui avaient deux enfants, Tilili et Ayour. Il vivaient heureux dans le désert d'Al Bani, avec leurs chameaux et leurs ânes. Ipomée fut prise d'une quinte de toux si forte qu'elle perdit la respiration et mourut. Le père et les deux enfants creusèrent une tombe dans la dune nommée Biwana et mirent sur la Tombe, selon la tradition berbère, des pierres plates comme des galets et des coquillages blancs. Massine pleura longtemps sa femme défunte. Il n'y avait plus de place pour rien d'autre. Il négligeait son champ et ses bêtes, ne s'occupait plus ses enfants. Bientôt cela commença à faire parler autour de lui. Massine était un notable, il avait un rôle à jouer au village. Il fallait qu'il se trouve une nouvelle épouse. Il alla voir son oncle Azul pour lui parler.
- Massine aime le pouvoir, répondit Azul aux villageois qui le questionnaient, il retrouvera bientôt la raison quand il verra que sa situation se dégrade.
Tafoulou qui passait par là, courut à son miroir pour farder ses yeux et sa bouche. Elle se présenta à Massine. Elle ondulait comme une dune dans la tempête, montrait ses dents blanches et ses longues mains. 
- Tes enfants sont gentils, mais il leur faudrait une nouvelle mère pour leur donner une éducation digne de toi, Massine. Bien sûr, quelqu'un que tu connais bien te faciliterait la tache.
Massine comprit ce qu'insinuait sa cousine. Il laissa passer trois jours, puis la fit appeler. 
- Tafoulou, tu as parlé de mes enfants. C'est vrai que depuis la mort de leur mère ils ne sont plus polis. Ils refusent de dire merci, font des grimaces dans le dos des passants. Ils ne travaillent plus à l'école.
- Ah ! Dit Tafoulou, tu vois j'avais raison. Je pense qu'il leur faut retrouver un cadre solide avec un père heureux et peut-être une nouvelle compagne qui pourrait leur apporter l'attention d'une mère.`
En prononçant ces dernières paroles, Tafoulou oublia volontairement de dire qu'elle pourrait aussi leur apporter son amour. Ce que Massine ignorait c'est que Tafoulou détestait les enfants. Ce qui l'attirait chez Massine c'était le coté respectable que sa condition de notable lui offrirait, mais certainement pas celle de mère. Massine se laissa séduire et deux semaines plus tard, un mariage fut célébré. Tililli et Ayour n'eurent aucun mot à dire et pressentirent dès l'échange des anneaux que cette femme ne serait pour eux qu'une marâtre et rien de plus.
Les premières semaines s'écoulèrent sans heurts particuliers. Massin partait travailler tandis que Tafoulou s'affairait chez la couturière berbère pour se faire faire des robes toutes plus affriolantes les unes que les autres. Jusqu'au jour où tristes et fâchés de ce manque d'intérêt pour eux, les deux enfants décidèrent de jouer un mauvais tour à Tafoulou. Sur le haut d'une porte, ils avaient glissé une bassine remplie d'eau. Quand Tafoulou ouvrit la porte, la bassine sur ses nouveaux atours se renversa. Ce qui la fit entrer dans une colère noire. Elle décida d'abandonner sur le champ ces deux petits avortons avec l'aide de Tarir, sorcière dévoreuse d'enfants, cachée là-haut dans la montagne du Rir.
Aussitôt dit, aussitôt fait. Abandonnés à la nuit tombée, les deux enfants se retrouvèrent seuls devant cette sorcière effrayante dont leur maman leur avait tant parlé.
Heureusement ce que Tafoulou ignorait c'est que l'esprit des morts veillait et que Ipomée, par son intermédiaire, fut avisée du destin mortifère de ses deux enfants et intervint pour les sauver.


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